TVA immobilière et application du régime de la marge : L’administration assouplit sa position

L’administration fiscale vient d’assouplir sa position en matière de taxation à la TVA sur la marge des ventes immobilières. Par une récente réponse « Vogel » (Réponse Ministérielle « Vogel » : Sénat 17mai 2018 n° 4171) celle-ci a admis, que la TVA due au titre de la vente d’immeuble soit calculée sur la marge même si le bien revendu diffère physiquement du bien acquis, notamment s’il est divisé en vue de la revente en plusieurs lots.

Pour rappel, les ventes de terrains à bâtir et d’immeubles anciens bâtis (pour lequel l’option à la TVA a été exercée) qui sont effectuées par des assujettis sont soumises à la TVA sur le prix total de la cession en application des dispositions de l’article 266 du CGI.

Toutefois l’article 268 du CGI prévoit de façon dérogatoire que le régime de la TVA sur la marge s’applique lorsque les immeubles cédés n’ont pas ouvert droit à déduction de la TVA lors de leur acquisition. C’est notamment le cas, en pratique lorsque l’assujetti professionnel de l’immobilier a acquis l’immeuble, objet de la vente auprès d’un particulier ou lorsque l’immeuble acquis bénéficiaire d’une exonération de TVA.

En ce qui concerne la question du régime de TVA applicable, l’administration adopte de longue date une position particulièrement restrictive, considérant que pour que la TVA puisse être calculée sur la marge, il convient que le bien revendu soit identique au bien acquis, non seulement par sa qualification juridique, mais également quant à ses caractéristiques physiques. La position de l’administration avait été confirmée fin 2016 par plusieurs réponses ministérielles (Rép. Bussereau AN 20 septembre 2016 n°96679 ; Rép. Savary AN 20 septembre 2016 n°94538 ; Rép. De La Raudière AN 30 août 2016 n°94061 ; Rép. Carré AN 30 août 2016 n°91143).

Cette prise de position de l’administration a toutefois été censurée par certains juges de l’impôt. Saisi de la question, le Tribunal administratif de Grenoble a jugé en se tenant semble-t-il à la lettre de la loi, que la seule condition d’application du régime de la TVA sur marge tenait à l’absence de droit à déduction de la TVA d’amont lors de l’acquisition du bien (TA de Grenoble 14 novembre 2016 n° 1403397 SARL Gepim Habitat jugement devenu définitif).

Plus récemment, cette solution a également été adopté par le Tribunal administratif de Montpellier (TA de Montpellier 4 décembre 2017 n° 1602770 SARL R.).

L’administration fiscale admet donc désormais que le régime de la TVA sur marge puisse s’appliquer même si les caractéristiques physiques de l’immeuble sont modifiées (notamment par division parcellaire) entre son acquisition et sa cession.

Dans le cas de l’acquisition d’un terrain ou d’un immeuble répondant aux conditions de l’article 268 du CGI, qui n’a pas ouvert droit à déduction, par un lotisseur ou un aménageur qui procède ensuite à sa division en vue de la revente en plusieurs lots, que ces ventes puissent bénéficier du régime de la TVA sur marge dès lors que seule la condition d’identité juridique est satisfaite. L’administration précise que cette position s’applique aux opérations en cours.

En revanche, elle refuse toujours l’application de la TVA sur la marge en cas de modification de la nature juridique de l’immeuble cédé et notamment dans le cas de la revente comme terrain à bâtir de la parcelle comprenant un immeuble bâti après démolition de ce dernier.

On notera que la position de l’administration demeure plus restrictive que la lettre de la loi telle qu’interprété par le juge de l’impôt et nous semble donc toujours contestable. On attendra avec impatience que la Cour d’appel se prononce sur cette affaire.

Jean-Christophe BOUCHARD
Avocat Associé
NMW Delormeau
Diplômé d’expertise comptable

Intervenant au sein des conférences EFE

 

Aurélia Allouche
Avocat à la cour
NMW DELORMEAU

www.nmwdelormeau.com

 

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