TVA immobilière : A partir de quel montant un loyer constitue-t-il une activité économique ?

Article rédigé par Me Rémi Castebert et Me Aurélia Allouche, avocats à la Cour, NMW DELORMEAU,  intervenant à la conférence Panorama de la fiscalité immobilière du mardi 19 juin 2018

Dans un arrêt en date du 19 octobre 2017 (CAA Nantes 19 octobre 2017, n°16NT01751CE SAS Le Domaine du Soleil Levant), la CAA de Nantes se prononce sur la question de la détermination du niveau minimum requis pour qu’un loyer caractérise l’exercice d’une activité économique au sens de la TVA.

Dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt commenté, la société par actions simplifiée (SAS) Le Domaine du Soleil Levant (ci-après la Société) exerçait une activité d’acquisition, d’aménagement et d’exploitation de terrains de camping. La Société possédait un terrain de camping sur lequel étaient aménagés 38 emplacements d’une superficie de 193 à 315 m2. Ces emplacements étaient tous loués aux actionnaires de la Société.

Suite à des opérations de contrôle, l’administration fiscale avait remis en cause les déductions de TVA effectuées par la société au motif, selon elle, qu’elle n’exerçait pas une activité économique au sens de l’article 256 A du code général des impôts (CGI).

Pour tenter de justifier sa position, le Service vérificateur s’est fondé sur le caractère anormalement bas des loyers facturés par la Société et le caractère manifestement insuffisant de la rentabilité des capitaux investis.

Les locations étaient consenties par la Société moyennant un tarif de deux euros hors charges par mètre carré et par an et qu’elles assuraient à la Société des recettes annuelles s’échelonnant entre environ 8.000 euros et 23.000 euros pour les trois années litigieuses.

Pour rappel, pour qu’un opérateur économique soit considéré comme un « assujetti à la TVA », celui-ci doit exercer de façon indépendante, une activité économique, quels que soient les buts et les résultats de cette activité. Une activité est, en règle générale, qualifiée d’économique lorsqu’elle présente un caractère permanent et est effectuée contre une rémunération perçue par l’auteur de l’opération.

La qualité d’assujetti à la TVA permet, en principe, à l’opérateur économique de déduire la taxe ayant grevé l’acquisition des biens et services supportés pour la réalisation de son activité économique taxable, ce qui a été remis en cause en l’espèce.

Dans l’arrêt commenté, la Cour rappelle, dans un premier temps, que la location d’un immeuble moyennant un loyer constitue en principe une activité économique et que la seule circonstance que, compte tenu notamment du coût de revient de l’immeuble, le loyer consenti soit anormalement bas au regard d’une gestion commerciale normale ne permet pas de remettre en cause cette qualification d’activité économique exception faite de l’hypothèse où le loyer serait purement symbolique et constituerait une libéralité consentie par le bailleur au bénéfice du preneur.

La Cour constate ensuite que locations sont consenties moyennant un tarif modique mais non symbolique et que le revenu qui en été tiré possédait, eu égard à la durée de location prévue aux contrats, un caractère de permanence pour en déduire que la Société exercerait bine une activité économique au sens de l’article 256 A du CGI et possédait donc bien la qualité d’assujettie à la TVA.

Sur ce point, il convient de noter que la solution retenue par la CAA de Nantes résulte du fait que l’administration fiscale n’a en l’espèce pas produit de termes de comparaisons en nombre suffisant et afférents relatifs à des modalités de location similaires (locations par une société de terrains de camping à ses propres actionnaires). Cette démonstration quoique délicate à fournir était absolument nécessaire afin de démontrer que le prix pratiqué était anormal et constituait donc une libéralité et pas une activité économique.

Cette affaire au dénouement heureux est l’occasion d’attirer l’attention des opérateurs économiques sur ce type de rectifications proposé en matière de TVA et qui peut entraîner des conséquences financières parfois extrêmement importantes et de leur rappeler l’importance de constituer un « bench mark » de comparables pertinents afin de justifier de la normalité des prix pratiqués et ce même hors opérations internationales.

Pour aller plus loin :

 

Rémi Castebert
Avocat à la cour
NMW Avocats
Intervenant au sein des formations fiscales EFE

Rémi Castebert est avocat au sein des départements fiscal et immobilier du cabinet NMW avocats. Il intervient en matière de fiscalité immobilière et accompagne des groupes de sociétés français et étrangers sur l’ensemble de leurs problématiques fiscales complexes (structurations, audit et opérations de revue fiscale, restructurations, fusions acquisitions, intégration fiscale et international tax planning etc.) et les assiste également dans le cadre de contrôle fiscal et de contentieux fiscal.

 

Aurélia Allouche
Avocat à la cour
NMW DELORMEAU
https://www.nmwdelormeau.com/

 

 

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