La remise d’un immeuble en paiement d’un dividende ne constitue pas une cession soumise aux droits d’enregistrement

Dans une récente en date du 15 mai 2018 (Réponse ministérielle Grau, JO AN, 15 mai 2018, p. 4063, n° 3508), le Ministre de l’Economie et des Finances a rappelé que la remise d’un immeuble en paiement d’un dividende, même si elle ne constitue pas une cession soumise à un droit d’enregistrement, reste cependant soumise aux impôts directs.

Pour mémoire, les mutations à titre onéreux d’immeubles ou de droits immobiliers sont, en l’absence d’acte, soumises aux droits d’enregistrement selon le taux prévu pour les opérations de même nature donnant lieu au paiement de la taxe de publicité foncière (CGI, art. 682). Les actes civils et judiciaires translatifs de propriété ou d’usufruit de biens immeubles à titre onéreux sont assujettis à une taxe de publicité foncière ou à un droit d’enregistrement à un taux de 3,80 % avec une modulation possible par les conseils départementaux, sans qu’il ne puisse être inférieur à 1,20 % ou supérieur à 4,50 % (CGI, art. 683 et 1594 D).

Selon une jurisprudence constante de la Cour de cassation, la remise d’un immeuble en paiement d’un dividende ne constitue pas une cession à titre onéreux soumise aux droits d’enregistrement (Cass. com., 6 juin 1990, n° 88-17.133 P et Cass. com., 12 février 2008, n° 05-17.085 F-PB, Garage de l’Etoile). Elle a ainsi jugé que les articles 682 et 683 du CGI visent exclusivement les mutations à titre onéreux. La décision de distribution de dividendes constitue un acte juridique unilatéral et non un contrat. Par suite, il n’y a pas transmission de propriété à titre onéreux, la remise de l’immeuble en paiement du dividende dû ne constituant pas une cession, et l’opération ne donne pas prise aux droits de mutation.

De la même manière, elle a jugé que le paiement de dividendes sous la forme d’actions (Cass. com., 31 mai 1988, n° 87-10.134 P, Bailly et Jacquot, BOI-ENR-DMTOM-40-10-10, n° 70), de même que sous la forme de remise de droits immobiliers (Cass. com., 6 juin 1990, n° 88-17.133 P, Sté Rougier), ou de remise de parts d’une SCI (Cass. com., 6 avril 1993, n° 90-21.941 D, Sabatier et Cass. com., 6 avril 1993, n° 90-21.940 D, Ramage, BOI-ENR-DMTOM-40-30, n° 100) ne constitue pas une cession soumise aux droits d’enregistrement.

Le Ministre reprend cette analyse du juge en rappelant que l’attribution aux associés de produits en nature, telle que la remise gratuite ou à prix réduit d’un immeuble, constitue une distribution taxable en matière d’impôts directs (pour les personnes physiques dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers de l’IR).

Le transfert des biens peut, par ailleurs, faire apparaître une plus-value taxable au niveau de la société distributrice à concurrence de la différence existant entre la valeur vénale du bien qui éteint la dette de dividende à payer, et sa valeur nette comptable.

Jean-Christophe BOUCHARD
Avocat Associé
NMW Delormeau
Diplômé d’expertise comptable

Intervenant au sein des conférences EFE

 

Rémi Castebert
Avocat à la cour
NMW Delormeau Avocats

Intervenant au sein des conférences EFE

Rémi Castebert est avocat au sein des départements fiscal et immobilier du cabinet NMW avocats. Il intervient en matière de fiscalité immobilière et accompagne des groupes de sociétés français et étrangers sur l’ensemble de leurs problématiques fiscales complexes (structurations, audit et opérations de revue fiscale, restructurations, fusions acquisitions, intégration fiscale et international tax planning etc.) et les assiste également dans le cadre de contrôle fiscal et de contentieux fiscal.

Pour aller plus loin