CVAE : Les dépenses de mécénat récurrentes sont déductibles pour le calcul de la valeur ajoutée

Dans un arrêt très attendu du 9 mai 2018 (CE 9 mai 2018, n° 388209 Caisse régionale du crédit agricole mutuel de Pyrénées Gascogne), le Conseil d’Etat a été amené à se prononcer sur une question source d’un contentieux récurrent. En matière de calcul de la valeur ajoutée soumise à la CVAE, la Haute Juridiction juge que les dépenses de mécénat présentant un caractère récurrent pour l’entreprise sont déductibles pour la détermination de la valeur ajoutée.

Par cet arrêt, le Conseil d’Etat met ainsi fin à un contentieux de place qui durait depuis de nombreuses années et a donné lieu à de nombreux redressements.

Dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt commenté, l’administration contestait la déduction des dépenses de mécénat au motif qu’elles n’étaient assorties d’aucune contrepartie pour la société. Ces dépenses ne pouvaient donc être considérées comme des biens et services en provenance de tiers au sens de l’article 1647 B sexies du CGI, qui définissait la valeur ajoutée (à savoir l’excédent hors taxe de la production sur les consommations de biens et services en provenance de tiers), mais constituaient, selon l’administration, une libéralité.

Le Conseil d’Etat censure cette analyse en jugeant que dès lors que les dépenses de mécénat présentent un caractère récurrent pour l’entreprise, elles constituent des charges d’exploitation, déductibles pour le calcul de la valeur ajoutée, sans qu’il soit besoin de rechercher si ces charges correspondent à l’acquisition d’un bien ou d’un service.

Dans cet arrêt, le Conseil d’Etat règle également la question du caractère courant ou exceptionnel des dépenses de mécénat. Cette question, si elle n’était pas au cœur de l’affaire jugée, est en pratique régulièrement soulevée par l’administration lors de vérifications.

En effet, l’administration a tendance à considérer que les dépenses de mécénat doivent être comptabilisées non pas parmi les charges d’exploitation mais parmi les charges exceptionnelles, lesquelles ne sont pas prises en compte pour le calcul de la valeur ajoutée.

Le Conseil d’Etat tranche ce point et juge que la réglementation comptable (règlement CRC n° 99-03 du 29 avril 1999, applicable dans la présente affaire) n’offre aucun choix aux entreprises s’agissant de la comptabilisation des dépenses de mécénat. Ainsi, ces dépenses qui se rattachent aux dons, doivent être comptabilisées en charges exceptionnelles lorsqu’elles ne peuvent pas être regardées, compte tenu des circonstances de fait, notamment de leur absence de caractère récurrent, comme relevant de l’activité habituelle et ordinaire de l’entreprise, et en charges d’exploitation dans le cas contraire.

Les dépenses de mécénat devraient ainsi, dans une majorité de cas, pouvoir être regardées comme des charges courantes, notamment dans le cas des sommes versées à des fondations d’entreprises dans le cadre de programmes pluriannuels.

Les entreprises concernées par cette décision ont désormais la possibilité de déposer des réclamations contentieuses afin d’obtenir un nouveau calcul de la valeur ajoutée et donc de la CVAE au titre des années encore ouvertes à réclamation, c’est-à-dire pour la généralité d’entre elles au titre de 2016 et 2017.

Jean-Christophe BOUCHARD
Avocat Associé
NMW Delormeau
Diplômé d’expertise comptable

Intervenant au sein des conférences EFE
Intervenant à la conférence Panorama de la fiscalité immobilière, mardi 19 juin 2018 à Paris

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