Pacte Dutreil – Cession partielle entre signataires en cours d’engagement collectif

Julien KOZLOWSKIJulien Kozlowski
Avocat Associé
FIDAL Société d’Avocats
Intervenant EFE à la formation « Redressements en gestion de patrimoine » le 18 octobre 2013 à Paris

Par une réponse ministérielle du 13 août dernier[1], l’administration a apporté des précisions critiquables sur les conséquences d’une cession partielle entre signataires d’un pacte Dutreil ISF, en cours d’engagement collectif de conservation.

Le parlementaire demandait si, en cas de cession partielle de titres en cours d’engagement collectif réalisée au profit d’un autre signataire de l’engagement collectif, le cédant conservait bien pour l’avenir l’exonération partielle d’ISF sur les titres qu’il a conservés.

Le ministre répond par la négative à cette question : « dès lors qu’un signataire cède un seul de ses titres en cours d’engagement collectif, il perd le bénéfice de l’exonération partielle d’ISF, au titre de l’année en cours ainsi qu’au titre des années précédentes pour lesquelles l’exonération s’est appliquée, et cela pour la totalité des titres détenus inclus dans le pacte, y compris donc pour les titres qu’il a conservés ».

D’après cette réponse, toute cession partielle de titres entre signataires d’un engagement collectif de conservation ISF entraînerait pour le cédant une remise en cause du bénéfice de l’exonération partielle, tant pour les titres cédés que pour ceux qu’il a conservés.

Pour l’administration, l’article 885 I bis b) permet de faire « circuler » les titres entre signataires sans entraîner la rupture du pacte qui se poursuit entre ceux qui ont conservé leurs titres. Il n’a pas en revanche pour objet d’exonérer celui qui s’est délié de son engagement.

La réponse du ministre est contestable. Elle est en contradiction avec l’article 885 I bis b) du CGI qui autorise expressément les cessions entre signataires : « Les associés de l’engagement collectif de conservation peuvent effectuer entre eux des cessions ou donations des titres soumis à l’engagement ». Comme le relève l’auteur de la question, la logique de ce texte est de permettre la libre circulation des titres soumis à engagement entre les signataires pendant toute la durée de l’engagement collectif.

Dès lors, on ne voit pas comment une cession expressément autorisée par les textes est susceptible d’emporter la déchéance du bénéfice de l’exonération partielle d’ISF pour le cédant.

L’administration applique au cédant les règles régissant les engagements individuels alors que la cession intervient au cours de l’engagement collectif.

Cette réponse ministérielle appelle en outre un certain nombre de questions :

–           Si l’engagement collectif de conservation se poursuit en cas de cession entre signataires (BOI-PAT-ISF-30-40-60-10, n° 180), en est-il toujours ainsi si la cession opérée a eu pour effet d’abaisser la participation engagée en dessous des seuils de 34 % ou 20 % ? Tous les participants à l’engagement perdent-ils alors le bénéfice de l’exonération de 75 % ?

–           La même analyse ne risque-t-elle pas d’être suivie par l’administration pour l’application des pactes Dutreil Transmission, l’article 787 B du CGI étant rédigé dans des termes similaires ?

Il serait souhaitable que l’administration revienne sur cette réponse qui n’est conforme ni à la lettre du texte ni à son esprit. 


[1] Rep Moyne – Bressand (AN 13 août 2013 p. 8722 n° 19550)

 

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