Nouvelle atteinte à l’application des pactes Dutreil « réputés acquis »

Grégory Dumont, Avocat Counsel, département droit du patrimoine, CMS Bureau Francis Lefebvre

Dans une réponse ministérielle Moreau du 7 mars 2017 (JOAN page 1983 n°99759), l’administration fiscale a une nouvelle fois limité le champ d’application des pactes Dutreil « réputés acquis ». La réponse ministérielle porte sur l’identité de la personne devant remplir l’obligation de direction exigée par le dispositif Dutreil lorsque l’engagement collectif n’a pas été souscrit mais qu’il est « réputé acquis ».

Rappelons que le régime Dutreil de l’article 787 B du Code général des impôts donne la possibilité aux donataires de titres de société de revendiquer une exonération partielle de droits de donation de 75% moyennant le respect d’une phase d’engagement collectif de conservation des titres transmis, le « pacte Dutreil », d’une durée d’au moins deux ans, puis d’une phase d’engagement individuel de conservation de quatre ans. Une obligation de direction de la société concernée doit également être remplie. Elle doit être satisfaite soit par un signataire du pacte, soit par un bénéficiaire de la transmission. Sous certaines conditions, le pacte Dutreil est « réputé acquis » et n’a pas à être signé. Dans cette hypothèse, seule la phase de conservation individuelle de quatre ans doit être respectée par les bénéficiaires de la transmission, ainsi que l’obligation de direction, d’une durée de trois ans à compter de la donation.

La question posée au Ministre portait sur la possibilité pour le donateur, en présence d’un pacte « réputé acquis », de remplir la condition de direction imposée par le régime Dutreil. L’administration répond par la négative au motif que le donateur n’a pas signé de pacte Dutreil. Pour l’administration, en présence d’un « réputé acquis », seul un donataire est autorisé à satisfaire l’obligation de direction.

La position de l’administration fiscale, défavorable aux contribuables, nous paraît contestable car il résulte tant de la lettre de la loi que des travaux parlementaires relatifs à la loi de finances rectificatives pour 2006, ayant introduit le « réputé acquis », que ce dispositif fait présumer l’existence d’un pacte. Le donateur est donc assimilé à un signataire d’un pacte Dutreil et devrait donc pouvoir à ce titre remplir l’obligation de direction.

La réponse ministérielle Moreau confirme la volonté de l’administration fiscale de limiter le développement du « réputé acquis ». Auparavant l’administration fiscale avait pris position pour écarter l’application du « réputé acquis » lorsque l’associé souhaitant transmettre ses titres ne détient pas directement la société éligible au régime Dutreil mais à travers une ou deux sociétés interposées. De même, en 2016, dans une réponse ministérielle Féron du 2 août 2016 (JOAN page 7144 n°72240), l’administration fiscale avait refusé de faire bénéficier les nouveaux titres émis à l’occasion d’une augmentation de capital, par incorporation de réserves, de l’antériorité de conservation de titres de la même société détenus par le redevable dans le cadre d’un engagement collectif « réputé acquis ».

Ces restrictions au « réputé acquis » accroissent les hypothèses où il est soit nécessaire, soit préférable de recourir à la signature effective d’un pacte Dutreil. Seule une parfaite maitrise des règles applicables au régime Dutreil et l’actualisation de ces connaissances permettent aux praticiens de conseiller au mieux les associés souhaitant transmettre leur patrimoine en profitant des avantages qu’offre le régime Dutreil.

Me-Dumont-208x300Grégory DUMONT
Avocat Counsel– département droit du patrimoine
CMS BUREAU FRANCIS LEFEBVRE
Intervenant à la conférence « Pactes Dutreil »  le jeudi 7 décembre 2017 à Paris

 

 

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